Pierre-Antoine Badaroux
Musician
September 2023
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« Les manuscrits sont des documents négligés, et leur contenu souligne combien les enregistrements ne représentent qu’une infime part de la vie de celles et ceux qui ont fait cette musique ; ils éclairent la face cachée de leur œuvre. »
En tant que saxophoniste, compositeur, arrangeur, mon travail se situe aux frontières du répertoire et de la création. Je tente, par la pratique musicale – relecture, déconstruction, découverte d’œuvres inédites, improvisation, réinterprétation, composition – et par une démarche expérimentale, d’exprimer un point de vue sur l’histoire du jazz.
Avec le Umlaut Big Band, que j’ai fondé il y a plus de 10 ans, j’approfondis une réflexion sur le travail souvent mésestimé des arrangeurs. Depuis quelques années, je côtoie les manuscrits de ces musiciens pour mieux comprendre leur processus d’invention, découvrir des œuvres oubliées, reconstituer des partitions fragmentaires, mais aussi rechercher une forme de transmission. Mes recherches sur Don Redman et Mary Lou Williams ont par exemple permis la découverte et l’enregistrement de nombreuses œuvres jusqu’ici inédites.
Cette aventure me permet aussi d’explorer les rapports que peuvent entretenir l’écrit et l’improvisé, le prédéfini et le spontané ; problématique qui me tient à cœur et qui, me semble-t-il, font se tenir ensemble toutes les musiques que je joue, aussi diverses soient-elles.
Né en 1986, Pierre-Antoine Badaroux a étudié le jazz au CNSMDP. Il enseigne actuellement au Conservatoire de Montreuil.
En tant que membre du collectif Umlaut, il participe depuis 2009 à la production et la diffusion d’une grande diversité de musiques : jazz, improvisation ou composition contemporaine et musique expérimentale. Fondateur et directeur artistique du Umlaut Big Band qui a publié 5 albums, dont le dernier, Mary’s Ideas, consacré à la musique de Mary Lou Williams. Le groupe est artiste associé au Théâtre de l’Aquarium depuis 2019. Il collabore avec la metteuse en scène Jeanne Candel pour le spectacle Baùbo, de l’art de n’être pas mort. Membre de divers ensembles, il figure à ce jour sur une vingtaine de références discographiques.
Mon projet s’inscrit dans la continuité du travail que j’ai mené ces dernières années avec le Umlaut Big Band, à la recherche d’une compréhension approfondie des enjeux artistiques, sociaux, culturels et historiques de l’écriture dans le jazz. Ma recherche s’organisera autour de l’étude des manuscrits disponibles aux États-Unis dans divers fonds d’archives.
Il y a au cœur de ce projet à la fois une dimension historiographique pour mieux comprendre comment l’histoire du jazz s’est écrite et quelles en sont les formes qui restent à imaginer, une dimension pratique qui nourrit mon travail de compositeur et saxophoniste, et une dimension culturelle qui vise à comprendre les enjeux de préservation du patrimoine du jazz.
L’histoire du jazz s’est écrite en se concentrant essentiellement sur son patrimoine enregistré. Les manuscrits sont des documents négligés, et leur contenu souligne combien les enregistrements ne représentent qu’une infime part de la vie de celles et ceux qui ont fait cette musique ; ils éclairent la face cachée de leur œuvre.
J’ai aussi amorcé, au contact de ces documents, une réflexion plus globale sur la place de l’écriture dans le jazz : Quelles dynamiques sont à l’œuvre entre écrit et improvisé, défini et spontané ? Comment écrire l’acte improvisé ? Quelle part peut-il y avoir de création collective dans une œuvre pourtant signée par un seul individu ?
Enfin, cette recherche a pour but de mieux comprendre le rapport des États-Unis à sa mémoire propre : Quelles sont les modalités de conservation de ces archives ? Comment les institutions participent-elles à la constitution d’un discours historique ? Dans quelles mesures l’existence de ces fonds d’archives participe-t-elle à la légitimation du jazz comme forme artistique symbolique des États-Unis ?
Le jazz est né aux États-Unis et ce sont les spécificités de la culture américaine qui ont permis et provoqué son éclosion. Son développement est intimement lié à l’histoire de ce pays : c’est ce qui a permis la constitution de fonds d’archives remarquables, liés à une politique de conservation et d’ouverture aux consultations du public.
Depuis New York, je pourrai consulter les fonds de l’Institute of Jazz Studies de Newark, la plus grande collection de jazz au monde, ainsi que les manuscrits de la New York Public Library.
A Washington, D.C., le National Museum of American History et le National Museum of African American History and Culture de la Smithsonian Institution hébergent de nombreuses collections d’archives de musiciens de jazz. La Library of Congress est l’une des plus grandes bibliothèques au monde. Gestionnaire des dépôts de copyrights et des dépôts légaux de toute œuvre publiée aux États-Unis, la bibliothèque accueille également d’importantes collections privées.
Enfin, je visiterai à Chicago les archives manuscrites conservées au Center for Black Music Research et à l’Université de Chicago.
En partenariat avec
Institute of Jazz Studies
La mission de l’Institute of Jazz Studies est de collecter, préserver et rendre accessible l’héritage du jazz, une forme d’art américain adoptée par le reste du monde.
La vie brève – Théâtre de l’Aquarium
La vie brève est une compagnie dirigée par Jeanne Candel, Marion Bois et Elaine Méric, qui ouvre depuis plus de 10 ans différents territoires de création qui décloisonnent les disciplines et dont la clef de voûte est l’enchevêtrement du théâtre et de la musique : bricoler l’opéra à partir d’œuvres préexistantes et approfondir cette recherche, faite d’un tressage implicite, où l’on ne sait plus si c’est la musique qui conduit le théâtre, ou le théâtre qui conduit la musique. À la direction du Théâtre de l’Aquarium, situé à la Cartoucherie, depuis le 1er juillet 2019, la vie brève accompagne en résidence de création une vingtaine d’équipes artistiques par an, dont trois sont associées à l’ensemble des activités de la maison pour la période 2022-2024.
Cité de la musique – Philharmonie de Paris
Située au cœur du parc de la Villette dans le Nord-Est parisien, la Cité de la Musique – Philharmonie de Paris est un complexe musical unique qui accueille près de 1.5 million de visiteurs chaque année.
Elle développe une programmation ambitieuse et éclectique (450 concerts et 2 à 3 expositions temporaires par an), tout en assumant pleinement son rôle social et sociétal. Elle vise ainsi à rendre accessible sa programmation à tous les publics, de tous âges et toutes origines sociales et géographiques, mais également à faire des enjeux d’égalité femmes-hommes, de diversité et d’éco-responsabilité une partie intégrante de son projet. C’est en ce sens qu’elle a créé, avec le Paris Mozart Orchestra, le concours de cheffes d’orchestre la Maestra et qu’elle développe de nombreuses actions sur l’ensemble du territoire en partenariat avec les collectivités, à l’instar du projet d’orchestres d’enfants Démos. Elle mène également des projets de coopération et de partenariat à l’international avec de nombreuses institutions culturelles (États-Unis, Brésil, Pays du Golfe, Pays européens…).