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Tatiana Vilela dos Santos

Game designer et artiste numérique
Mi-février - Mi-avril 2023

  • Création numérique
  • Los Angeles
  • San Francisco

« L’installation ludique permet, entre autres, de s’émanciper de l’injonction industrielle à l’immersion dans l’espace numérique. »

Le 27 janvier 2010, Steve Jobs annonce le lancement du premier iPad au Yerba Buena Center à San Francisco. Cette nouvelle technologie marquera l’entrée des tablettes numériques dans les foyers. Peu de temps après, j’obtiens mon premier emploi dans l’industrie du jeu vidéo. Encore étudiante en game design, j’ai pour mission de défricher le potentiel ludique de cette terra incognita. Deux ans plus tard, je suis game designer spécialisée en nouvelles technologies. Je conçois des expériences ludiques pour la réalité mixte, des interfaces de captation gestuelle ou encore la robotique.

En 2012, non-soumise aux prescriptions d’usage des périphériques standards, je prends goût à cette liberté qui m’est donnée de suggérer les interactions de demain. Je m’émancipe des injonctions industrielles et développe une pratique artistique de la conception ludique à travers l’artgame. Je développe des jeux vidéo prenant les codes ludiques à rebrousse-poil, forçant les joueurs à transgresser les règles du système tout en les désorientant par des techniques inspirées de l’art optique. L’année suivante, mon travail s’oriente vers des installations interactives ludiques qui seront plus tard qualifiées de « jeux à contrôleur alternatif ». Plus radicale encore, cette pratique consiste à proposer des expériences ludiques contrôlées sans manette, ni clavier, ne présentant parfois même pas d’écran, mais des interfaces dites dédiées, créées spécifiquement pour ces dispositifs.

Dès 2014, je participe activement à la diffusion de cette pratique du game design à travers des conférences et ateliers en sus de l’exposition de mes travaux. Cette approche contre-culturelle du détournement des contrôleurs et autres périphériques informatiques, qui remet l’espace et le corps au cœur du jeu, trouve écho dans différentes communautés, de l’art numérique au mouvement maker.

Depuis 2017 et ma première exposition solo, mon travail consiste à dépasser la contestation pour constituer une proposition artistique à part entière. Mes efforts tendent à explorer le potentiel expérientiel des installations ludiques à un niveau conceptuel, dans leur héritage artistique du critical design au surréalisme, et dans leurs particularités formelles comprenant notamment l’impact du tangible sur l’engagement corporel, la porosité physique-numérique et l’incarnation de l’expérience particulièrement sensorielle. Mon objectif : au-delà des pixels, penser l’expérience ludique dans l’atome comme dans la chair.

Tatiana Vilela dos Santos est chercheuse au Centre de recherche sur les médiations (CREM), game designer indépendante et artiste numérique plusieurs fois récompensée (A MAZE., Maker Faire, EIGD…) basée à Paris. Depuis 2012, elle réalise des installations ludiques et des jeux artistiques dans le cadre de son projet multimédia interactif « MechBird ». La plupart de ses créations sont des jeux à contrôleur alternatif : des œuvres vidéoludiques contrôlées par des interfaces tangibles faites main, construites spécifiquement pour ces expériences. Ce travail par-delà la manette et l’écran, explore les territoires vierges de l’art ludique pour réenchanter le réel par le numérique.   

« Toute technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie. »  Arthur C. Clarke

Ce projet avec la Villa Albertine s’inscrit dans mes recherches sur le potentiel expérientiel de l’installation ludique. Il part d’un constat menant à une hypothèse qui sera éprouvée par mes rencontres et visites durant mon séjour.

L’installation ludique permet, entre autres, de s’émanciper de l’injonction industrielle à l’immersion dans l’espace numérique. Aujourd’hui, la qualité d’un jeu vidéo classique s’évalue à sa capacité à immerger le joueur dans le cadre confiné de l’écran, lui faisant oublier son corps en présence dans l’espace physique. Le joueur n’a plus à se projeter mentalement dans l’espace numérique, c’est l’espace physique qui se voit envahir par la magie numérique. Ce renversement permet alors d’intégrer le corps du joueur aux espaces ludique et fictionnel.

L’hypothèse que je souhaite tester par ce projet est la suivante : par le surgissement du numérique dans le réel, il est possible de susciter une attitude ludique (playfulness), un état mental altéré caractérisé par une curiosité et un sens de l’émerveillement. Dans une volonté d’ancrer l’installation ludique dans un héritage artistique, effectuer un rapprochement à l’histoire des arts semble tout indiqué. Je questionnerai dès lors le rapport entre ludique et le psychédélisme en tant que mouvement artistique qui invite à la redécouverte de l’ordinaire et l’enchantement du trop familier par un état altéré de conscience.

Ce travail d’exploration consiste à identifier et analyser les mécaniques à l’œuvre dans ces expériences en ce qu’elles ont de commun : curiosité, (re)découverte de l’ordinaire, (ré)enchantement du familier, regard nouveau sur le banal… Je mettrais en regard ce caractère actif de l’état ludique et la nature plus passive et perceptive du psychédélique. Pour ce faire, j’entends rencontrer des acteurs de ces deux mouvements issus de l’art et de la recherche, expérimenter leurs travaux pour tisser des liens sociaux et conceptuels. Ces échanges nourriront une œuvre ludique mêlant tangible et numérique inspirée de ces deux mouvements, qui sera réalisée, dans un second temps, au Château Éphémère en France.

« Turn on, tune in, drop out » Timothy F. Leary

Plus que le sens de l’émerveillement, l’art psychédélique et le jeu à contrôleur alternatif ont en commun le territoire qui les a vu naître : la Californie et principalement San Francisco. Nul besoin de présenter la communauté Hippies des années 1960-1970 réunie dans la ville sur la baie et son lien avec les origines de l’art psychédélique. L’Histoire du jeu à contrôleur alternatif reste, elle, méconnue. Le mouvement « alt.ctrl », terme qualifiant à la fois les créateurs de jeux à contrôleur alternatif et leurs créations, tire en effet son nom de l’espace d’exposition dédié à ce type de jeux. Cet espace a été ouvert dans le cadre de l’un des plus grands événements pour les développeurs vidéoludiques du monde, la Game Developers Conference (GDC), qui se tient chaque année à San Francisco. Si des exemples de cette pratique se retrouvent dans des événements européens ou encore à l’IndieCade dès le début des années 2000, l’ouverture de l’alt.ctrl.GDC fédère le mouvement sous une bannière commune.

Cette pratique de la conception ludique et celle de l’art psychédélique ne restent toutefois pas confinées aux frontières de l’état et s’étendent en réalité sur tout le Sud-Ouest américain. On retrouve ainsi, de Los Angeles à Denver, plusieurs laboratoires de recherches dédiés à ce type de création (UCLA, UCSC, USC, UC Boulder…), de nombreux lieux dédiés à la diffusion de projets culturels ludiques inspirés de l’art psychédélique (Meow Wolf, Dreamscapes, Wink World….) ainsi que les artistes aux origines de ces œuvres.  La culture native américaine dans l’art psychédélique répartie sur les sept états qui composent cette région géographique des États-Unis est également essentielle.

En partenariat avec

Château Éphémère

Château Éphémère est un tiers-lieu culturel dédié aux arts numériques et à la création sonore.
Lieu de résidence pour les artistes, il est implanté dans un lieu patrimonial reconverti – Le Château Vanderbilt- à Carrières-sous-Poissy (78), propriété de la Communauté urbaine Grand Paris Seine et Oise. Fabrique artistique au carrefour de la recherche, de l’expérimentation, des sciences et des arts, le château propose des contenus et des activités à la portée de tou.te.s, notamment par ses ateliers et ses temps publics.

 

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Centre de Recherche sur les Médiations (CREM)

Unité de recherche de l’Université de Lorraine, le CREM regroupe 200 chercheurs appartenant à 11 disciplines dont près de 90 % aux sciences de l’information et de la communication, aux sciences du langage, aux études de langue et littérature françaises et aux sciences de l’art. Face aux mutations sociales, culturelles, artistiques et technologiques, les chercheur·se·s du CREM interrogent les processus et formes de médiation qui interprètent et donnent sens à celles-ci. Les recherches visent à modéliser ces dynamiques, à cerner les enjeux des rapports à des normes et à des écarts, à comprendre les phénomènes de régulation.

 

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IndieCade

IndieCade soutient le développement de jeux indépendants et organise une série d’événements internationaux mettant en avant l’avenir des jeux indépendants. Il encourage, fait connaître et cultive l’innovation et le sens artistique dans toutes les formes de médias interactifs, contribuant à créer une perception publique des jeux comme étant riches, divers, artistiques et culturellement significatifs. Les événements et les initiatives d’IndieCade sont conçus pour donner de la visibilité aux travaux émergents et inspirer et connecter cette communauté mondiale d’innovateurs. IndieCade est organisé par une vaste équipe de personnes dévouées qui croient vraiment que nous pouvons avoir un impact sur l’industrie et, en fin de compte, sur la façon dont le monde joue, comprend et est influencé par les jeux. À cette fin, IndieCade soutient le développement de jeux indépendants.

 

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Siana

Siana œuvre depuis 17 ans sur le territoire d’Evry et de l’Essonne pour une meilleure connaissance des enjeux du numériques et de ceux qui démystifient usages et technologies au quotidien : les artistes du numérique.

 

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Un Singe en Hiver

Tiers-lieu culturel dijonnais ouvert en 2020, Un Singe en Hiver accueille en son sein une brasserie artisanale au rez-de-chaussée et un plateau de 150m² dédié à la création numérique et aux musiques actuelles à l’étage.

 

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