Deena Abdelwahed
Productrice en musique électronique et DJ
Automne 2023
Marie Rouge
- Musique
- Atlanta
- New York
« Mon souhait pour cette résidence de recherche, c’est de comprendre les différents éléments musicaux qui alimentent les dancefloors »
Je m’appelle Deena Abdelwahed. Je suis Tunisienne mais je suis née et j’ai grandi au Qatar jusqu’à mes 18 ans. À Tunis, je découvre la musique hors de mon walkman et d’internet, dans les salles de concert : la scène, le public, le dancefloor et les fêtes organisées avec différents DJs qui se succèdent… Ça m’a saisi toute de suite. Je suis devenue très active et enthousiaste à l’idée d’en faire partie et d’y apporter de la nouveauté. Ce qui m’a poussé à prendre cette voie (apporter de la nouveauté), c’est que durant mes visites et mes interventions dans différents événements de musiques électroniques, seule la classe aisée et intellectuelle y avait accès. Disons que j’étais un peu jalouse, que ce n’était pas donné à tout le monde alors qu’historiquement, cette musique était le fruit de l’expression de la communauté afro-américaine souvent considérée à l’époque comme pauvre et délinquante.
Depuis, j’ai sillonné l’Europe et les pays arabes an tant que DJ et musicienne Live, après avoir sorti un album et deux EPs sur le label parisien InFiné, plusieurs morceaux en collaboration et des remix. Et à présent, je travaille sur un projet de performance musicale en collaboration avec deux des meilleurs artistes de la scène musicale arabe alternative : Khayam Allami et Aya Metwalli, afin d’appliquer nos recherches et nos questionnements à un format correspondant plus aux dancefloors.
Productrice et DJ Tunisienne, Deena Abdelwahed a signé sur le label parisien InFiné plusieurs disques, dont « Khonnar » (2018) et « Dhakar » (2020). Ses explorations sont des tentatives pour se réapproprier les éléments qui forment la diversité de la musique arabe et sont influencées autant par la musique des Clubs que par la scène expérimentale actuelle. En Live set ou en DJ set, Deena Abdelwahed a joué notamment au Sonar Festival en Espagne, au CTM Festival à Berlin, au Mutek Festival à Mexico et dans des clubs comme Concrete à Paris, le Berghain à Berlin et Mutabor à Moscow.
J’aimerais continuer à faire de la musique dansante en prenant en considération les enjeux socioculturels et les inégalités entre ceux que les dancefloors intimident et ceux qui appartiennent à une élite dominante. Dans mon cas, en tant qu’artiste originaire des pays arabes, j’aimerais évidemment travailler sur la réappropriation de la musique arabe et l’adapter à la musique amplifiée sans pour autant être sous l’influence des notions musicales occidentales. La communauté afro-américaine aux Etats-Unis a su détourner ces notions-là et créer sa propre musique et sa propre modernité. Comment et pourquoi cette musique a-t-elle triomphé dans le monde entier ? Comment apprendre de cette expérience pour aboutir à un résultat similaire tout en développant les différences propres à chaque culture ? En quoi cela peut-il apporter une capacité d’affirmation de soi à ceux qui sont intimidés par les dancefloors, dans des villes où la musique amplifiée est monopolisée par une élite ?
J’ai toujours été passionnée par la synergie entre la danse et les musiques électroniques aux Etats-Unis ; le breakdance sur de la musique Hip-Hop ; le Jazz dance sur de la musique House ; Le Voguing sur de la musique Ballroom ; Le Footwork sur de la musique Juke… Je suis persuadée que pour qu’une musique électronique soit démocratique, accessible et parlant à tout le monde, des danses et des mouvements doivent y être associés. Mon souhait pour cette résidence de recherche, c’est de comprendre les différents éléments musicaux, techniques ou créatifs, qui alimentent les dancefloors.
J’entamerai ma résidence de recherche d’abord à Atlanta, berceau du mouvement afro-américain des droits civiques, mais aussi une ville connue pour sa musique urbaine qui a envahi les radios internationales à la fin des années 1990 et dans les années 2000 notamment avec le Atlanta Bass, le Crunk, le Dirty South et les rappeurs engagés politiquement comme OutKast.
Ensuite je prendrai place à New York, ville historique des clubs et des warehouse qui a abrité les meilleurs DJs du monde et les communautés LGBT de toutes origines sur ses dancefloors. À présent, c’est la ville phare des Etats-Unis en matière de musique électronique expérimentale et d’art numérique.
Et enfin Chicago, où l’évolution de la house vers le juke et le footwork a épaté le monde de la danse urbaine. Ces deux genres sont mes premiers amours en musique électronique dansante. Leurs technicités avant-gardistes pourtant issues des communautés supposées « pauvres et non éduquées » ont influencé une grande partie de la musique électronique expérimentale dansante d’aujourd’hui.
En partenariat avec
L’Institut du monde arabe a été fondé en 1980 par la France et les États de la Ligue arabe pour faire connaître et rayonner la culture arabe sous toutes ses formes. Lieu de rencontre et d’échange, installé dans un bâtiment conçu par Jean Nouvel et Architecturestudio, inauguré en 1987, l’IMA contribue depuis 35 ans au renforcement des liens culturels, politiques, économiques et sociaux entre la France et le monde arabe.
Fondé en 2006 par Alexandre Cazac et Yannick Matray, le label InFiné se développe à Paris, Berlin, et par-delà les frontières à la rencontre de projets variés qui aiment transcender les genres. Depuis 15 ans, le label et éditeur accueille et soutient des artistes du monde entier tels que Rone, Bruce Brubaker, Deena Abdelwahed, Vanessa Wagner, Murcof, Arandel, Aārp, ou plus récemment, Mischa Blanos, Léonie Pernet, Sabrina Bellaouel, Lucie Antunes, Bottler, Basile3, Toh Imago... Résolument indépendant, InFiné est une plateforme de création engagée pour une « Musique Durable » composée de « Music Activists » qui ne cessent d’œuvrer pour la diversité et l’innovation.