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Léa Bismuth

Autrice et Commissaire d’exposition
Octobre 2022

Juliette Agnel

  • Arts visuels
  • Houston

« Il se pourrait que regarder vers le haut nous permette d’envisager autrement le rapport à notre planète abimée. Ma résidence sera à l’origine d’un travail littéraire cosmopoétique et d’une exposition d’art contemporain. »

En tant que critique d’art, chercheuse et commissaire d’exposition, j’explore les zones d’actions potentielles entre littérature et art contemporain. Pour cela, j’écris des textes sur des artistes et des écrivains de notre temps, en considérant toujours l’écriture comme un geste d’élucidation actif, dans une perspective de co-création. À l’origine de mes projets curatoriaux, il y a toujours le désir de réveiller des notions que j’emprunte à l’histoire de la pensée et à partir desquelles j’imagine dialectiquement une « libre adaptation », comme on le dit usuellement au cinéma ou au théâtre. Car, ce qui compte, c’est l’étincelle entre la source de départ et ce que nous pouvons en faire : ainsi, j’ai entrepris de mettre en scène la pensée de Georges Bataille lors du cycle curatorial La Traversée des Inquiétudes (à Labanque de Béthune, de 2016 à 2019, avec une trentaine d’artistes ayant produit des œuvres inédites pour l’occasion). Dans cette perspective, parait aussi le livre collectif que j’ai conçu et dirigé : La Besogne des images (Filigranes Éditions, 2019), et pour lequel j’ai fait intervenir artistes, philosophes et écrivains. Parallèlement, je mène des recherches plus solitaires mêlant littérature, philosophie et sciences sociales, qui sont à l’origine d’une thèse de doctorat que je soutiendrai en décembre 2022 à l’EHESS sous la direction de Marielle Macé, et intitulée : « Écrire : un passage à l’acte ». Tout cela nourrit des textes poétiques, des récits, des amorces de fiction qui innervent les différents chantiers que j’entreprends. 

 

Léa Bismuth conçoit des expositions selon une méthode d’écriture collective. Elle a été notamment commissaire pour Labanque (Béthune), les Tanneries (Amilly), le Musée Delacroix (Paris), le centre d’art Image-Imatge (Orthez), le CAC La Traverse (Alfortville), les Rencontres d’Arles, le Drawing Lab (Paris), le BAL (Paris), les Nouvelles Vagues du Palais de Tokyo, plusieurs galeries et écoles d’art. De 2006 à 2018, elle publie très régulièrement dans artpress. Ses derniers textes sont parus aux éditions Actes Sud, Hatje Cantz, Loco, ou le quotidien AOC. Enfin, elle enseigne en écoles d’art (notamment à l’Ecole des Arts de la Sorbonne). 

Mon projet pour Marfa, intitulé Eternity by the stars, est une citation directe à la pensée d’Auguste Blanqui [1805-1881] et à la brillante cosmogonie qu’il écrivit en 1871. Blanqui était l’un des théoriciens les plus actifs de la Commune de Paris, mais il ne put y participer car il était retenu captif au Fort du Taureau, une prison située au milieu des mers — dans la Baie de Morlaix en Bretagne française. C’est là que son regard se porte vers le ciel et qu’il formule une hypothèse astronomique hallucinée, inspirée par le mouvement infini de l’univers. Sa pensée nous offre aujourd’hui le ferment d’une réflexion spéculative fondée sur des liens féconds entre résistance politique, acte poétique, et environnement. L’Eternité par les astres inspira Nietzsche pour sa formulation de l’éternel retour ou encore Walter Benjamin dans ses réflexions mélancoliques sur la révolution, mais il s’agit encore de prendre acte de ce livre ici et maintenant : le ciel étoilé peut-il être un outil d’émancipation ? Les étoiles éteintes peuvent-elles renaitre si l’on parvient à créer de nouvelles étincelles ? Car la question de l’éternité astrale est une question révolutionnaire au sens premier du terme. Il se pourrait que regarder vers le haut nous permette d’envisager autrement — en nous dégageant de tous les paradigmes de domination autoritaire — le rapport à notre planète abimée. Ma résidence sera à l’origine d’un travail littéraire cosmopoétique et d’une exposition d’art contemporain. 

Située au milieu du désert texan, la ville de Marfa est un territoire propice au rêve, à l’imagination et à l’utopie. En effet, c’est en 1971 que Donald Judd, acteur majeur de l’art minimal, décida de s’y établir, et que l’on peut aujourd’hui découvrir ses installations à l’air libre, de même que la Fondation Chinati, dans un contexte d’ébullition artistique. Non loin de là, se situe l’Observatoire astronomique McDonald où l’environnement stellaire est étudié scientifiquement à l’aide de télescopes de pointe. Dans cette perspective, Marfa est devenu un territoire stratégique dans le contexte de l’« exploration », voire de la « colonisation » de l’espace (de Mars notamment) : cela donnera matière à penser dans le contexte politique et social actuel aux États-Unis, eu égard à la préservation de la planète que nous habitons. Marfa est aussi un lieu d’observation par excellence, car dénué de pollution lumineuse, et offrant une visibilité très privilégiée sur la voie lactée. Ce triple mouvement — artistique, scientifique, et in fine politique et environnemental— formera la dynamique dialectique du travail de recherche « situé » que je souhaite mener lors de mon séjour, en échange permanent avec l’équipe d’artistes et de chercheurs qui sera constituée lors du programme de résidence. 

En partenariat avec

Centre Pompidou

Depuis 1977, le Centre Pompidou présente une riche programmation aux croisements des disciplines et des publics. Son bâtiment emblématique, qui abrite l’une des deux plus grandes collections d’art moderne et contemporain au monde, ainsi que des expositions, des colloques, des festivals, des spectacles, des projections ou des activités pour les plus jeunes, en font une institution sans équivalent, profondément ancrée dans la cité et ouverte sur le monde et l’innovation.

 

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