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Yohanne Lamoulère

Photographe
Mai 2025

yOHANNE lAMOUL7RE
  • Arts visuels
  • Atlanta

« Atlanta me parait parfaite pour accueillir ce projet : elle est le berceau du hip-hop, légendaire, et ses similitudes avec Marseille, ville du sud, me semblent évidentes. »

Je suis une femme photographe de 43 ans. Je fais partie du collectif Tendance Floue et de la compagnie Zirlib. Après mes études à l’Ecole Nationale supérieure de photographie d’Arles, fascinée entre autres par le travail de Diane Arbus, je me suis orientée vers une forme de photographie documentaire. Je suis arrivée à Marseille par la périphérie et j’ai commencé à aborder cette ville comme une ville universelle, un terrain de jeu privilégié qui me permet encore aujourd’hui de photographier ceux que j’appelle « les vivants », dans un décor en pleine restructuration. Mon appareil enregistre les mutations de la ville, très efficientes dans les quartiers populaires, et j’observe la manière dont le lien identitaire au quartier est puissant. 

J’ai par la suite accepté de faire entrer dans mon champ lexical la fiction, la mise en scène. Que nous dit la photographie ? Uniquement la vérité ? Et si nous avions le droit de mentir, nos corps, nos quartiers, tout autant que le Pouvoir quand il affirme que la ville est à chacun d’entre nous ? La finalité : un homme en tutu sur un scooter, un indien au milieu des bâtiments de son quartier, une jeune femme alanguie aux ongles faits cohabitent. L’accumulation fait narration. Pour une question de sincérité et d’adresse, je mêle ma voix à celles des gens que j’ai l’habitude de photographier. Ne pas faire sans la ville, ne pas faire sans ses habitant.e.s. Le réel est toujours là, mais l’acceptation de la subjectivité et de l’écriture collective aussi. 

 

Yohanne Lamoulère est diplômée de l’École nationale supérieure de photographie d’Arles en 2004. Ses thèmes de prédilection sont la périphérie des villes et l’insularité dans ce qu’elle a de protéiforme. Elle publie Faux Bourgs (éd. Le Bec en l’air) en 2018, compilation de ses séries sur Marseille. Son travail a fait l’objet de nombreuses expositions : MUCEM (Marseille), festival Portrait(s) (Vichy), Fondation Schneider (Wattwiller), festival ImageSingulières (Sète), Clervaux-Cité de l’image (Luxembourg), et figure parmi des collections publiques et privées (CNAP, BnF, Neuflize-OBC). Membre des collectifs Tendance Floue et Zirlib , elle prépare actuellement son premier film, L’œil Noir. 

Les questions que soulèvent le déploiement des Brass Bands aux Etats-Unis me paraissent correspondre au projet que j’ai mené pendant toutes ces années à Marseille : celle de la communauté, du « faire corps », du lien identitaire à la ville, au quartier, le rapport à la discipline dans des espaces malmenés, le lien au costume, au carnaval et plus largement à la représentation de soi.  

Je vais suivre le quotidien de plusieurs écoles de musique et de la même manière que j’ai travaillé sur l’incarnation d’une ville universelle à Marseille, je souhaiterai dépasser l’aspect local des bands, pour, à travers eux, parler d’adolescence, du lien à la famille, à l’identité collective.  

J’ai eu la chance d’assister à une drumline competition en 2023 au festival Music in the park organisé par Kebbi Williams à Atlanta. Chaque groupe de musiciens s’entraîne puis défile, comme une parade avant le combat final, puis se mesure aux autres dans un battle jouissif. Cela peut faire penser au Haka dans le rugby, ou à certaines mises en scène dans le catch, une forme d’exagération hypnotique qui rend la scène à la fois intense et drôle et qui permet à chaque groupe de construire collectivement une identité forte et d’envisager la musique comme un spectacle et un dépassement de soi.  

J’y ai fait des photographies et c’est un medium parfait pour se mesurer à l’autre : la fierté que j’ai observée dans les yeux des adolescents embrasse l’art du portrait. La force de la figuration humaine découle de la volonté d’exister devant l’objectif, de l’affirmation de soi. La fanfare et la photographie sont, en ce sens, faits pour se rencontrer.  

Atlanta me parait parfaite pour accueillir ce projet : elle est le berceau du hip-hop, légendaire, et ses similitudes avec Marseille, ville du sud, me semblent évidentes. 

 Je suis en relation avec trois écoles, dans trois quartiers de la ville, avec lesquelles il serait possible d’engager cette série photographique. Ce sera Southwest Dekalb High School Drumline à Decatur, Tri Cities High School Drumline à East Point et Jonesboro High School à Jonesboro. Je souhaiterai rester deux mois et suivre les adolescents à travers leur scolarité, mais aussi à la maison ou dans la pratique de leurs loisirs, pour témoigner de cette jeunesse atlantaise. Je pense travailler comme je le fais à Marseille : au Rolleiflex, en couleur et en prenant le temps nécessaire avec les gens que je photographie. La meilleure période pour cela serait pendant l’année scolaire et avant les échéances musicales. Cette série s’inscrirait naturellement dans la continuité de mon travail photographique, et me permettrait de pousser encore un peu plus mes réflexions sur la lumière qui émane de la jeunesse des quartiers populaires. 

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