Lune Diagne
Artiste plasticien, chorégraphe et danseur
- Arts de la scène
- New York
« Cette exploration des archives de la vie de Siki, des lieux qu’il a fréquentés et des traces qu’il a pu laisser à New York viendra enrichir ma réflexion plus large sur la géopolitique du corps, c’est-à-dire une manière de voir le corps comme une tapisserie complexe de relations intimes et relationnelles, et d’espaces politiques qui doivent trouver leur place dans le paysage mondial. »
Je m’appelle Alioune Diagne. Je vis au Sénégal et aux Pays-Bas, où j’exerce, sous le nom de Lune Diagne, mon activité d’artiste plasticien, chorégraphe et danseur. J’ai étudié à l’Ecole des Beaux-Arts de Dakar de 2006 à 2007. Fin 2007, j’ai décidé de me consacrer à la danse contemporaine, tout en continuant à pratiquer le dessin et à m’intéresser aux arts visuels, en travaillant avec des plasticiens pour créer des performances autour d’œuvres qui m’inspirent. Depuis trois ans, après des années de danse, est revenu aux arts visuels.
Depuis 2018, je créé des tableaux et des dessins sur les expressions faciales des fantassins sénégalais massacrés au camp de Thiaroye le 1er décembre 1944. Cette série des Tirailleurs a attiré l’attention du monde de l’art et des sciences. L’historien Jean-François Leguil-Bayart lui a consacré un article, Alioune Diagne, ou la mémoire juste des tirailleurs, dans lequel il considère que mon travail restitue « la mémoire juste, une présence critique du passé, épurée de toute rancœur, de toute haine, de toute colère, mais qui rappelle ce qui a été et n’aurait pas dû être. »
Depuis trois ans, après des années de danse, Alioune Diagne est revenu aux arts visuels. Il a été formé à la danse contemporaine par Saliani Seydou, Kettly Noël, Germaine Acogny et Ciré Beye. Après deux solos (Blabla et Cette ligne est mon chemin), il a connu un grand succès avec Banlieue, création pour trois danseurs qui traite du quotidien dans les banlieues sénégalaises, coproduite par le CCN Ballet Preljocaj-Pavillon Noir à Aix-en-Provence et l’Institut français de Saint-Louis, au Sénégal. Après avoir été programmée au Festival international Danse, l’Afrique, danse! à Soweto, en Afrique du Sud, Banlieue a été sélectionné pour une tournée dans 18 pays africains en 2013. En parallèle, Diagne a interprété le solo Flora du chorégraphe Kenzo Kusuda au Théâtre Korzo et un rôle dans Fagaala de la compagnie Jant-Bi de Germaine Acogny. Depuis 2019, il participe à une résidence artistique au Stadsgehoorzaal à Kampen, aux Pays-Bas. En 2008, il a fondé la Diagn’Art Dance Company, à Saint-Louis, initiatrice et productrice du Duo International Danse Solo, seul festival annuel de danse contemporaine au Sénégal. En ce qui concerne les arts visuels, Diagne a participé à plusieurs expositions au Sénégal et aux Pays-Bas, et est actuellement représenté par OH Gallery.
Pour ce projet de résidence, je souhaite me rendre à New York sur les traces de Battling Siki, afin de me documenter sur le quartier où il vivait et s’entraînait, les circonstances de son assassinat en 1925, une affaire jamais résolue. J’irai à la rencontre des New-Yorkais, pour les interroger sur leur relation avec la génération des années 1920, période de la Renaissance de Harlem où les arts, la politique, la littérature noire et bien d’autres domaines encore fleurissaient à New York.
Je m’intéresserai également à la génération actuelle car la communauté sénégalaise à New York est très importante, si bien qu’un quartier de Manhattan (celui où vécut Siki) est surnommé Le Petit Sénégal. Je tenterai d’en faire l’inventaire, année par année, depuis les années 1920, peut-être par une analyse corporelle dans l’espace, car les corps noirs étaient souvent menacés aux États-Unis et en France à l’époque. Je m’interrogerai donc le statut actuel des corps noirs, et son évolution depuis les années 1920, afin de faire toute la lumière sur la vie de Siki et les injustices entourant sa mort, et d’approfondir la géopolitique des corps noirs, étant donné que Siki s’est servi de son propre corps comme moyen de survie et de subsistance, des deux côtés de l’Atlantique.
Le fruit de cette recherche prendra la forme d’une installation, avec des sculptures, des tableaux, des photos et d’autres objets que je récupérerai d’Amsterdam, New York, Marseille et Saint Louis, qui sont les villes où Siki a vécu. Au cours d’un spectacle de danse contemporaine participative, j’encouragerai le public à interagir librement avec l’interprète et l’œuvre d’art.
J’ai choisi les États-Unis car Battling Siki y a mené plusieurs combats et passé les trois dernières années de sa vie avant d’être assassiné, le 15 décembre 1925.
J’aimerais discuter avec des New-Yorkais qui connaissent l’histoire de la ville depuis les années 1920, pour suivre les traces de Battling Siki, comprendre où il vivait, boxait, sortait la nuit, et découvrir les lieux qui ont marqué sa vie là-bas.
J’aimerais aussi rencontrer des artistes américains qui s’intéressent à la boxe, aux corps noirs dans l’espace, et à la présence des personnes de couleur dans cette Amérique cosmopolite.
Cette exploration des archives de la vie de Siki, des lieux qu’il a fréquentés et des traces qu’il a pu laisser à New York viendra enrichir ma réflexion plus large sur la géopolitique du corps, c’est-à-dire une manière de voir le corps comme une tapisserie complexe de relations intimes et relationnelles, et d’espaces politiques qui doivent trouver leur place dans le paysage mondial.
En partenariat avec
Ford Foundation
The Ford Foundation is an independent organization working to address inequality and build a future grounded in justice. For more than 85 years, it has supported visionaries on the frontlines of social change worldwide, guided by its mission to strengthen democratic values, reduce poverty and injustice, promote international cooperation, and advance human achievement. Today, with an endowment of $16 billion, the foundation has headquarters in New York and 10 regional offices across Africa, Asia, Latin America, and the Middle East.