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Chloé Bensahel

Artiste textile
3 Novembre 2023 - 18 Novembre 2023 & 2 Février 2024 - 15 Mai 2024

Cyrille de la Motte Rouge

  • Design & Métiers d'art
  • Boston

« L’objectif est de trouver un matériau qui remplisse la fonction historique et multiculturelle de système de stockage de mémoire des textiles. »

Diplômée de la Parsons School de New York en textiles en 2013, je me forme ensuite auprès d’artisans, d’abord à Kyoto dans l’atelier de Jun Tomita puis en Australie au Australian Tapestry Workshop. J’y découvre un monde où le textile véhicule à la fois la terre dont il est issu et l’histoire de son peuple, technique millénaire entre matière et geste. 

En tant qu’artiste tisserande, je m’intéresse aux facettes à la fois anciennes et contemporaines d’une matière “codée” d’histoires écrites par les gestes nécessaires à sa réalisation. J’y retrouve des histoires qui s’inscrivent dans la matière subrepticement à travers un point, un bouton, une broderie, une intention. Je tisse donc des matériaux qui sont imprégnés d’histoires: du papier doté de textes, des chemises appartenant à des inconnus. En 2019, je poursuis ce travail au Mobilier National dans les manufactures de tapisserie, dans le but de l’associer à l’innovation du fil conducteur (Google Jacquard.) Cette nouvelle matière tissée déclenche, par le geste, sons, lumières ou tout autre appareil connecté. La matière peut ainsi raconter des histoires, par la douceur d’une caresse ou la vitalité d’une danse. 

 

Née en 1991, Chloé Bensahel est une artiste franco-américaine qui mêle performance, textiles et multimédias pour éclairer la relation entre langage et identité. Inspirée par l’expérience migratoire de sa propre famille, elle associe dans son travail la narration et les traditions artisanales pour faire naître un langage intégré ou codé. En 2021, elle a obtenu une bourse de recherche de la Smithsonian Institution. Ses œuvres ont été exposées dans le monde entier, notamment au Mobilier national à Paris, à l’Australian Tapestry Workshop de Melbourne et à l’Ambassade de France à Washington.   

La relation entre textile et mémoire a toujours existé. Les techniques textiles, des langages de programmation aussi puissants qu’efficaces, ont contribué à envoyer l’Homme dans l’espace grâce à l’invention de la mémoire à tores magnétiques, qui mêle structures textiles et code binaire. Ces technologies, majoritairement créées par des femmes issues des minorités ethniques, d’abord à Boston puis à l’étranger, ont posé les jalons d’un système dans lequel le travail artisanal est largement invisibilisé. 

Une résidence à la Villa Albertine de Boston me permettra de revenir au MIT, où la mémoire à tores magnétiques était tissée, afin de travailler sur une nouvelle technologie de mémoire, en collaboration avec le MIT Media Lab. Je m’intéresserai plus particulièrement à la façon dont les propriétés de la mémoire à tores (ferroélectricité, fil conducteur) peuvent être exploitées pour créer une technologie contemporaine à partir de techniques textiles traditionnelles (dentelle, tissage, tricot). L’objectif est de trouver un matériau qui remplisse la fonction historique et multiculturelle de système de stockage de mémoire des textiles. 

Les expériences seront menées au MIT avec une équipe de chercheurs du MIT Media Lab (Vera Van de Seyp, Cédric Honnet, Ozgun Kilic Afsar). Des échantillons seront tissés à la main et sur un métier jacquard digital (TC2) situé au laboratoire Advanced Functional Fabrics of America, afin de tester différents prototypes en continu. Nous travaillerons notamment sur des propriétés magnétiques afin que le textile puisse changer de forme par champs magnétiques et la garder (mémoire de forme.) Des surfaces textiles fabriquées à la main permettront ainsi de changer de forme par le toucher, à chaque passage de la main, dans une démarche qui se rapproche de la robotique molle. Cette étude interdisciplinaire sera documentée et publiée en ligne, dans une démarche où l’artisanat et l’ingénierie seront intrinsèquement liés. 

L’histoire de Boston est ancrée à la fois dans la production textile et l’innovation technologique. Ses usines textiles ont permis à une main d’œuvre qualifiée de produire des technologies de mémoire tissées à la main pour les missions spatiales des années 1950 et 1960. L’expertise artisanale nécessaire pour produire ces dispositifs électroniques a ensuite été délocalisée à l’étranger dans les années 1960, ce qui a transformé notre concept d’objets électroniques, qui ne sont plus vus comme des créations manuelles, alors qu’ils sont souvent inventés ou assemblés à la main. 

Ma résidence se nourrira de ce riche terreau historique pour imaginer de nouvelles technologies. En revisitant les premières technologies spatiales et les anciennes pratiques textiles, elle mettra en avant l’innovation des techniques textiles manuelles, en collaboration avec les chercheurs du MIT Media Lab. Je chercherai à définir la manière dont la programmation et l’ingénierie en sont venues à être perçues comme des métiers d’avenir, et l’artisanat comme une occupation désuète, et le rapport potentiel entre ces catégories et les hiérarchies ethniques et genrées. Avec l’émergence récente des textiles intelligents, le rapport entre textiles et technologie a été remis au goût du jour à Boston. C’est l’occasion idéale d’envisager de nouvelles méthodes de recherche dans lesquelles l’artisanat et la technologie contribueraient à égalité à déterminer la forme et la fonction d’un matériau. J’ai hâte d’en discuter avec les acteurs du secteur de l’innovation à Boston, en organisant des débats ou des conférences pour rappeler que les techniques textiles sont un langage de programmation sophistiqué qui peut engendrer de futures inventions. 

En partenariat avec

Mobilier National

Le Mobilier national a pour mission d’assurer la conservation et la restauration de ses collections, issue des achats et commandes destinés, hier aux demeures royales et impériales, aujourd’hui aux palais officiels de la République. Ces collections sont constituées de plus 130.000 objets mobiliers ou textiles. 

Le Mobilier national dispose de sept ateliers de restauration – tapisserie, tapis, tapisserie d’ameublement et tapisserie décor, menuiserie en sièges, ébénisterie et lustrerie-bronze.

Les manufactures nationales des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie, ainsi que les ateliers conservatoires de dentelle d’Alençon et du Puy-en-Velay sont rattachés à l’administration du Mobilier national.

L’institution dispose par ailleurs d’un Atelier de recherche et de création – l’ARC – pour promouvoir la création et le design contemporain dans les bâtiments officiels. 600 prototypes d’une centaine de designers ont été réalisés en plus de 50 ans. 

Les services du Mobilier national et des manufactures nationales incarnent le prestige de la tradition française, l’excellence d’un savoir-faire d’exception et la vitalité de la création artistique et du design contemporain.

 

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Fondation Bettencourt Schueller

La Fondation Bettencourt Schueller s’applique à incarner la volonté d’une famille, animée par l’esprit d’entreprendre et la conscience de son rôle social, de révéler les talents et de les aider à aller plus loin, dans trois domaines qui contribuent concrètement au bien commun : les sciences de la vie, les arts et la solidarité. À la fois fondation familiale et reconnue d’utilité publique depuis sa création, en 1987, la Fondation Bettencourt Schueller entend « donner des ailes aux talents » pour contribuer à la réussite et à l’influence de la France. Pour cela, elle recherche, choisit, soutient, accompagne et valorise des femmes et des hommes qui imaginent aujourd’hui le monde de demain, dans trois domaines qui contribuent concrètement au bien commun : les sciences de la vie, les arts et la solidarité. 

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