Gala Espel
Designer
Mai-Juin 2023
- Design & Métiers d'art
- New York
« À quoi ressemblerait un design originaire de Brooklyn ? Comment générer un univers d’objets fidèle à ceux qui l’habitent aujourd’hui? Et comment initier ce projet afin d’inclure les populations locales détentrices de savoirs et ainsi créer du lien ? »
Designer et architecte d’intérieur, j’ai développé une pratique à l’international et lors d’itinéraires en Asie au contact d’artisanats séculaires. À travers ces cheminements, je me suis ouverte à d’autres manières d’appréhender l’objet ; fait l’expérience d’usages et de traditions fortes en relation avec un territoire. J’ai trouvé dans le concentré exceptionnel d’images et de culture que j’avais traversé, une source inépuisable de potentiel. Mon positionnement en tant que designer peut se définir comme : « Être toujours en mouvement », « Engager sur du long terme », « Examiner le proche » ou encore « Penser à petite échelle ».
Cette volonté de créer des liens culturels profonds et des correspondances a animé ma pratique dès mon diplôme, dans ma région natale, pour lequel j’ai rassemblé historiens, sociologues, artistes et artisans pour créer une collection d’objets autour des matériaux, des codes culturels et de l’héritage de la Catalogne.
Pour moi l’objet est un moyen de connecter des individus et de célébrer des spécificités culturelles et de prolonger un patrimoine existant. Ma démarche, à travers l’artisanat, vise à générer un design natif d’un territoire, synonyme de développement économique, culturel et de lien social.
Gala Espel est une designer de 24 ans diplômée de l’Ecole Camondo en 2021. En 2020, elle remporte le concours national lancé par Le Bon Marché, lui permettant de collaborer avec le studio Nendo à Tokyo. En 2021, elle affirme son positionnement sur l’importance de l’artisanat avec la scénographie d’inauguration du 19M, lieu des métiers d’art de Chanel. En 2022 elle est lauréate de l’appel à projet « Mondes Nouveaux » du Ministère de la Culture. Son travail a été exposé à la Milan et à la Paris Design Week ainsi qu’au Musée des Arts Décoratifs.
Pour le projet de recherche à la Villa Albertine, je réfléchis à la façon de repenser et de se réapproprier le design au sein d’un espace urbain. À quoi ressemblerait un design originaire de Brooklyn ? Comment générer un univers d’objets fidèle à ceux qui l’habitent aujourd’hui? Et comment initier ce projet afin d’inclure les populations locales détentrices de savoir et de savoir-faire et ainsi créer du lien ?
Un nouveau territoire à découvrir et une autre richesse : l’opportunité exceptionnelle de me retrouver dans un lieu constitué non pas d’une, de deux ou de trois cultures mais d’une multitude d’entre elles. Cette recherche s’intéresse à l’idée d’objets riches de la diversité culturelle d’une ville.
Pendant deux mois, je voudrais fabriquer un réseau multiculturel d’artisans à Brooklyn et développer avec eux l’idée d’un design qui porte cette diversité. Je souhaite réfléchir avec des intellectuels, des créateurs, des fabricants et penser des objets qui seraient révélateurs, explicites de cette polysémie des cultures qui constitue la richesse de cet arrondissement. Objets issus d’hybridation de techniques artisanales ou de croisements entre traditions et coutumes. Objets qui se façonnent à plusieurs et qui portent en eux les histoires des artisans qui les auront réalisés. Ce sont véritablement des formes qui verraient le jour dans une conversation à la fois orale mais aussi matérielle entre différentes personnes.
La meilleure manière de rendre compte de cette recherche était de l’intituler « Objets du dialogue » : un dialogue des cultures, un dialogue des artisanats. J’envisage ce projet comme une mise en relation de plusieurs acteurs, un apprentissage mutuel et un élan créatif pour le futur. Car ce sont dans ces interactions et dans ces croisements que naissent de nouvelles formes de création. Et Brooklyn pourrait en être le laboratoire.
À Brooklyn, il existe un long héritage de créations hybrides. La cohabitation de différents genres et la mixité de ses habitants ont toujours eu pour conséquence naturelle de produire des formes innovantes nées du dialogue. Ces croisements viennent du simple fait que plusieurs cultures se rencontrent, interprètent et transforment la création de l’autre.
Les hip hop philippin et indien fusionnent les codes asiatiques et afro-américains. L’argot du centre de Brooklyn doit autant à Kingston qu’au Sud des Etats Unis et les jeunes portoricains de Greenpoint savent mérenguer tandis que les dominicains dansent la salsa et rappent en deux langues.
Nous connaissons ces mélanges éclectiques en musique, en danse, en mode mais pas en design. Je veux voir ce que cela peut produire. Pour ce projet dont l’ambition est d’offrir un terrain d’échange et de partage autour d’une série d’objets représentatifs de Brooklyn, c’est avec la même liberté et la même spontanéité que je voudrais travailler. Cette recherche gravite autour des questions de l’immigration, de l’assimilation et du croisement des courants culturels en promouvant la variété d’expressions.
Lors d’une exploration, il est inutile de prévoir à l’avance comment vont se déployer les idées et jusqu’à quel point. Ainsi, si ce processus est entamé dans les ateliers de Brooklyn, il ne devrait pas être vu comme l’aboutissement d’une seule pensée en objets, mais plutôt comme un potentiel, une expérimentation collective, une manière d’engager l’intelligence de la main sur des questionnements intimes et politiques.
En partenariat avec
École Camondo
L’École Camondo est une entité de l’institution Les Arts Décoratifs institution culturelle française dont la collection est l’une des plus importantes au monde. Elle délivre, à Paris comme à Toulon, un diplôme d’architecte d’intérieur et designer de niveau 7 visé par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche, Bac+5 conférant le niveau de master.
WantedDesign
À propos de WantedDesign :
Fondée en 2011 à New York par les franco New-Yorkaises Odile Hainaut et Claire Pijoulat, WantedDesign a évolué en un connecteur et amplificateur dynamique pour le design mondial, favorisant la synergie créative et servant de carrefour essentiel pour la communauté internationale du design. Après une transformation importante au cours des dernières années, l’entreprise intergénérationnelle dirigée par des femmes inclut désormais la partenaire colombienne Daniela Giraldo Hinestroza et continuera à s’appuyer sur ses fondations de communauté, d’éducation et de curation. À travers sa diversité de programmes – y compris des résidences, des ateliers, des voyages d’immersion et un programme d’adhésion – WantedDesign connecte les designers à chaque étape de leur carrière avec des acteurs clés de l’industrie à travers les Amériques et l’Europe. Claire et Odile, basées à New York, ont également pris le rôle de directrices de marque pour l’ICFF depuis 2023. Daniela continue de diriger depuis sa ville natale de Medellín, Colombie.
L’héritage de WantedDesign comprend le WANTED (précédemment connu sous le nom de WantedDesign Manhattan), acquis par Emerald Expositions en 2019 pour devenir une section au sein de la Foire Internationale du Mobilier Contemporain. Les cofondatrices, Odile et Claire, ont pris leur rôle de directrices de marque de l’ICFF en 2023 et continueront à diriger le salon en 2024. WantedDesign continuera à soutenir la section WANTED à l’ICFF pour mettre en avant un design émergent exceptionnel.
À propos du programme de résidence de WantedDesign :
Présenté en partenariat avec Industry City, le programme de résidence WantedDesign à New York offre une opportunité unique aux créatifs internationaux de s’immerger dans la scène design dynamique de la ville. Avec le soutien d’organisations culturelles internationales, cette immersion sur mesure permet aux résidents d’explorer, de rechercher, de créer des réseaux et de mieux comprendre le marché américain et ses opportunités.
Fondation Bettencourt Schueller
La Fondation Bettencourt Schueller s’applique à incarner la volonté d’une famille, animée par l’esprit d’entreprendre et la conscience de son rôle social, de révéler les talents et de les aider à aller plus loin, dans trois domaines qui contribuent concrètement au bien commun : les sciences de la vie, les arts et la solidarité. À la fois fondation familiale et reconnue d’utilité publique depuis sa création, en 1987, la Fondation Bettencourt Schueller entend « donner des ailes aux talents » pour contribuer à la réussite et à l’influence de la France. Pour cela, elle recherche, choisit, soutient, accompagne et valorise des femmes et des hommes qui imaginent aujourd’hui le monde de demain, dans trois domaines qui contribuent concrètement au bien commun : les sciences de la vie, les arts et la solidarité.