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L’impact de l’IA et des technologies immersives sur l’éducation

Par J. Arnaud  

Lors de la Nuit des idées à l’université de Harvard, Jean Arnaud, cofondateur d’une startup spécialisée dans la création d’environnements d’apprentissage immersifs basés sur l’IA, a évoqué le potentiel de la combinaison de l’intelligence artificielle et des technologies immersives dans le domaine de l’éducation. Arnaud a expliqué comment ces technologies pourraient révolutionner notre approche de l’apprentissage, l’utilisation d’avatars combinée à l’IA produisant des avantages exceptionnels pour les étudiants, notamment la promotion du développement personnel et de l’inclusion. Cependant, il montre également l’importance de reconnaître les limites de ces technologies, qui devraient être utilisées comme un outil pour amplifier l’intelligence humaine et les idées, et non pour les contrôler. 

A Harvard, pour La Nuit Des Idées, intellectuels, savants, étudiants, artistes et leaders se sont succédés pour décliner le thème « More » (Plus) dans une symphonie de pensées. Esther Duflo et Abhijit Banerjee, lauréats du prix Nobel en économie, évoquent ce qui sera notre fil conducteur à tous : définir en pensée, au moyen de la philosophie, ​​une science réfléchie, éthique et responsable, susceptible d’édifier un monde qui soit le reflet de nos valeurs. Force est de constater que nous vivons une ère de transformations profondes. Les progrès rapides des nouvelles technologies nous contraignent à nous interroger sur l’avenir que nous voulons pour nous-mêmes et pour nos enfants.  

Je suis intervenu aux côtés de James Katz, professeur spécialiste des nouveaux médias, pour évoquer l’intelligence artificielle et les technologies immersives telles que les métavers, ces univers digitaux qui permettent aux utilisateurs connectés d’interagir entre eux, mais aussi avec l’environnement numérique dans lequel ils évoluent sous la forme d’avatars. Ces technologies constituent une révolution aussi importante que celle qu’a entraînée la machine à vapeur pour l’ère industrielle. Combinées, elles peuvent produire dans le domaine de l’éducation une expérience d’apprentissage immersive, interactive, inclusive et personnalisée.  

Un étudiant peut visiter une cité ancienne comme Rome avec ses camarades de classe et son professeur. Il est capable de se rendre dans les temples dont est parsemé le Forum. Il peut obtenir des informations sur l’architecture de ces bâtiments ou sur leurs différentes fonctions mais aussi utiliser des jeux éducatifs intégrés qui permettent d’apprendre en manipulant, de retenir en réinvestissant les connaissances mais aussi de développer le jugement critique dans le cas de jeux de rôle ou encore l’esprit d’analyse, la résolution de problèmes et la créativité. En effet, comme les espaces numériques peuvent être modifiés, il est possible de recréer des monuments romains en utilisant ses connaissances et en travaillant, dans le même temps des compétences qui seront nécessaires dans l’avenir, comme le design et le code.  

Les métavers peuvent donc être utilisés pour promouvoir des pédagogies nouvelles « actives » et des « projets » particulièrement présents dans les établissements les plus prisés dans le monde comme OMIA, EJM et l’International School of Boston (ISB). Par ailleurs, grâce à l’intégration de l’IA aux environnements immersifs et interactifs tels que les métavers, il est possible de rencontrer Jules César et de discuter avec lui en latin, ou de rencontrer Cicéron et d’avoir un cours de rhétorique avec lui ou une discussion philosophique.  

Les bénéfices sont donc indéniables sur le plan académique, c’est en tous les cas ce que semblent indiquer les résultats que notre entreprise Nova, qui construit des environnements immersifs et interactifs dans le métavers combinés avec l’IA, a obtenus avec ses tests menés en classe. Ils sont aussi considérables sur le plan du développement personnel et de l’inclusion : les étudiants, qui sont protégés par des avatars, ne sont plus soumis aux jugements discriminatoires de leurs pairs et peuvent ainsi non seulement être ce qu’ils désirent mais aussi devenir pleinement eux-mêmes en exploitant leur potentiel.   

Lorsque l’on considère le futur avec la combinaison de l’IA et du métavers l’on obtient ce que nous faisons avec Nova : un assistant personnalisé capable d’aider l’étudiant dans son organisation quotidienne, capable de l’accompagner dans la compréhension de ses erreurs et dans les stratégies à adopter pour progresser, susceptible de mesurer ses connaissances et tout ce qui lui reste à accomplir, capable de prolonger son monde, d’accroître ses pensées et d’amplifier sa voix. D’ailleurs, que pourraient bien valoir ces technologies si elles n’étaient pas une extension du monde et de soi ?  

Elles doivent être au service « d’un mieux », produire des expériences uniques d’apprentissage dans lesquelles chacun peut accomplir son propre potentiel. N’est-ce d’ailleurs pas à cette finalité que toute éducation idéale doit tendre ? Il est donc nécessaire de comprendre leur fonctionnement pour prévenir leurs dangers : la dépendance, la sécurité, les biais, l’isolement social, la manipulation, et promouvoir les bénéfices que nous voulons voir triompher : l’expérience d’apprentissage immersive, interactive et créative, la collaboration en temps réel, l’apprentissage et progression personnalisés, l’accès à des ressources éducatives plus riches, l’évaluation continue des performances.  

Derrière toute technologie c’est encore l’esprit qui commande. La technologie n’est qu’un instrument au service de la compréhension lorsque l’esprit analyse, ou de la création lorsqu’il imagine. Il nous appartient de la maîtriser en adoptant une posture philosophique et éthique. Il est essentiel que chacun prenne sa part de responsabilité, éducateurs, administrateurs, membres du gouvernement, ingénieurs, philosophes, et parents parce que l’éducation n’est pas un secteur, c’est aussi et surtout le fondement de notre société tout entière. 

Ce qui fait l’intérêt de ces technologies nouvelles tient aussi à leur caractère disruptif : elles permettent de remettre en question ce que nous tenions pour acquis – la certitude n’est-elle pas le poison de l’esprit ? – en établissant des changements de paradigmes importants. Dans le domaine de l’éducation l’on passe d’un environnement dans lequel les étudiants sont passivement assis dans une classe à écouter le professeur, à un univers illimité, décentralisé, qui dépasse les frontières du monde physique, puisque chacun peut être connecté depuis des endroits différents, et qui offre une expérience d’apprentissage immersive, interactive, collaborative, inclusive et personnalisée.  

Dans d’autres domaines d’activité, ce sont les questions du public qui nous conduisent au débordement de notre thème initial, des concepts doivent être redéfinis, comme celui de l’art lui-même, dans la mesure où l’artiste peut proposer une expérience interactive, symbolique et « palimpsestique » dans laquelle la vision artistique est démultipliée dans des expériences infinies à la fois musicales, poétiques, philosophiques comme celle que nous avons proposée avec Prometheus «the dawn bringer », une expérience artistique de la totalité à laquelle le spectateur peut participer activement en explorant les différents niveaux de sens qui peuvent être infinis ou en reconstruisant l’œuvre à sa façon. Le spectateur peut alors lui-même devenir créateur et prolonger l’œuvre d’art par sa propre activité. L’œuvre d’art n’est plus simplement l’incarnation d’une quête personnelle et ontologique destinée à être contemplée, elle offre un monde aux possibilités infinies et devient une expérience partagée.  

L’IA nous contraint également à repenser ce qu’est un artiste et ce qu’est une œuvre d’art : l’artiste n’est pas un artisan et le chef-d’œuvre n’est pas un artefact, l’art est un monde approfondi d’âme. Le métier d’artiste, comme celui de professeur et bien d’autres encore, est inexorablement voué à la transformation. Il se servira des IA comme d’outils nouveaux dont il s’alliera les forces et qu’il lui faudra maîtriser, comme un amplificateur de lui-même, de ses idées, de sa voix, de son geste. 

Il convient de comprendre que tous les secteurs de l’activité humaine sont sur le point de connaître une réforme structurelle profonde dont les répercussions seront aussi politiques, économiques et sociales. La révolution numérique est en marche et elle est inéluctable. Conscient de ses limites l’esprit humain a été contraint de s’inventer des outils capables d’accroître son potentiel intellectuel. S’il ne veut être dépassé par sa création et être possédé par ce qu’il devait gouverner il lui faut encore vouloir l’Idéal et définir « l’être » de sa machine c’est-à-dire l’arrière-plan métaphysique dont selle sera composée tout autant que ce qu’il lui faudra accomplir, les fins auxquelles elle devra tendre. Nous ne devons jamais oublier que nous sommes les créateurs et que la création ne peut nous échapper que si nous la laissons commander, comme le cavalier ne peut lâcher la bride sous peine d’être désarçonné.  

La discussion avec James Katz s’est achevée sur cette question philosophique : monde voulons-nous bâtir avec ces technologies ? Qu’est-ce que ce monde « du plus » ou « du mieux » que l’IA et le métavers peuvent contribuer à faire exister ? Riches de soi et débordés de soi, toujours plus des autres, toujours plus du monde, toujours plus conscients, toujours maîtres de notre destin, responsables de nos choix, il nous appartient de créer l’idéal que nous rêvons et partageons.  

Nous sommes peut-être revenus à ce que la Renaissance ancienne adorait et portait aux nues : la culture d’un esprit polyvalent. Nous marchons vers cette Renaissance nouvelle, que véhicule le web3, nous les créateurs d’avenir qu’anime la volonté de participer à ce qui nous dépasse et qui – au-delà – flamboie : le rêve « Humanité ». Nous avons, tous, le monde en responsabilité. Je repense alors à ce que disait mon grand-père, issu de l’immigration italienne, dont la fille devait un jour franchir les portes de l’ENS : « Que vaut un esprit cultivé s’il ne répand ses lumières au-delà des frontières de sa propre maison, s’il n’est un phare pour l’humanité entière ».  

Plus d’informations : www.novavirtualworld.com ;  www.jeanarno.com ; www.jeanarnaud.org 

 

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