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Julie Bourges

Photographe
Mars-avril 2025

  • Arts visuels
  • San Francisco

« La représentation de la main est centrale dans mon travail autour des femmes et de la mer. L’importance de son utilisation dans ce type de navigation a participé de mon intérêt pour la navigation polynésienne. En plus des étoiles, ils s’orientaient grâce au soleil, la direction du vol des oiseaux, les courants, la salinité de l’eau, les débris flottants, l’odeur de la terre et leur instinct. »

Enfant, je passais de longues heures à lire et à imaginer d’autres mondes. Aujourd’hui, je transforme la réalité en la photographiant et j’en crée une autre qui me paraît plus belle et plus mystérieuse. 

 

J’ai toujours été attirée par les artistes qui floutent les limites entre le réel et le rêve : Fellini, Angelopoulos, Calvino. Ils modifient notre perception et l’ouvrent à un niveau plus subtil. J’aime les images minimalistes, fragmentaires, qui permettent à l’imagination de se frayer une place. En découpant en petits morceaux le monde, je tente de mieux le comprendre, d’en trouver les repères, de modifier ses contours. Mes images se veulent abstraites, hors du temps, symboles. 

Pendant une dizaine d’années, j’ai composé des séries très introspectives qui sont comme des passages ou des traversées. «  Umbra  » nous plonge dans la nuit parisienne. «  Haïkus  » nous enveloppe dans le brouillard de la lagune de Venise à la recherche d’un horizon insaisissable. « Les corps absents » sondent le mystère de la transmission et des liens familiaux et ancestraux. 

Aujourd’hui, je souhaite animer mes images en y ajoutant de la narration. À partir de l’ouvrage de Clarissa Pinkola Estes, « Femmes qui courent avec les loups », j’ai commencé une série de récits sur des femmes en lien avec les métiers de la mer. Entre récit mythologique et personnages contemporains, ces légendes d’aujourd’hui nous encouragent à nous reconnecter à notre force naturelle, à notre nature sauvage enfouie. 

 

 

Julie Bourges a débuté la photographie en 2004 en se consacrant au documentaire. Cest avec sa série « Flamencos » en 2009 quelle se tourne vers une écriture plus poétique. En 2021, elle reçoit le Soutien à la photographie documentaire du CNAP pour lensemble de son projet sur les femmes et la mer qu’elle tisse depuis 2018. En 2022, elle est lauréate de la grande commande photographique de la BNF pour son projet sur les femmes marins-pêcheurs. En 2023, le prix Résidence pour la photographiede la fondation des Treilles lui permet de commencer son chapitre sur les navigatrices. En 2024, sa série «  Les eaux-fortes »  remporte la mention spéciale du prix Eurazeo et est finaliste du festival de la Villa Noailles. 

Après des années consacrées à développer mon projet sur les femmes et la mer en France, je souhaite lui donner une nouvelle ampleur en explorant de nouveaux horizons, de nouveaux imaginaires et de nouvelles croyances. 

La Polynésie s’est imposée à moi comme une évidence. Les Polynésiens sont connus pour leur talent de navigateur. Il y a 3 000 ans, les marins embarquaient sur de grands canots qu’ils avaient eux-mêmes construits pour explorer le Pacifique. Ils lisaient la voûte céleste comme une carte inversée qui leur permettait de savoir exactement où ils étaient et dans quelle direction ils devaient aller. Les étoiles leur permettaient de connaitre le positionnement géographique de leur pirogue en utilisant leur main comme moyen de mesure. La représentation de la main est centrale dans mon travail autour des femmes et de la mer. L’importance de son utilisation dans ce type de navigation a participé de mon intérêt pour la navigation polynésienne. En plus des étoiles, ils s’orientaient grâce au soleil, la direction du vol des oiseaux, les courants, la salinité de l’eau, les débris flottants, l’odeur de la terre et leur instinct. Pendant des siècles, ce remarquable savoir sur la navigation a été transmis de génération en génération à travers des chants. Aujourd’hui, tout cela a pratiquement disparu à cause de l’émergence de la technologie occidentale, mais certains navigateurs et navigatrices la pratiquent encore et mettent un point d’honneur à la transmettre. 

Kala Tanaka est une des navigatrices qui pratiquent et enseignent cette navigation traditionnelle. Elle vit à Maui et elle est une des « porte-parole » de cette communauté. Je souhaite la rencontrer et la suivre dans son activité. Je photographierai ensuite différentes femmes qui naviguent dans la région. Ce chapitre prendra naissance sous les étoiles et sera nourri des traditions polynésiennes, renforçant ainsi la dimension mythologique de mon travail. 

J’ai souhaité faire ma résidence à Hawaï car, selon l’état de mes recherches actuelles, ce sont les îles Polynésiennes où cette navigation traditionnelle est la plus vivante.  

Je serai basée sur l’île de Maui qui est la deuxième plus grande île d’Hawaï après Honolulu. J’espère pouvoir naviguer avec les femmes qui pratiquent cette  navigation dans l’archipel et explorer avec elles les autres îles hawaïennes depuis la mer. 

En partenariat avec

Fondation des Treilles

Située en Provence, la Fondation des Treilles a été créée par Anne Gruner-Schlumberger. Elle a pour mission de soutenir et de faire dialoguer la recherche et la création en organisant et en accueillant des séminaires, des séjours d’étude et des résidences d’écriture, de photographie et de composition musicale.

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