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Amélie Mouton

Journaliste, autrice
Avril 2025

  • Littérature
  • Washington, DC

« Le Texas et l’Alaska sont peut-être aujourd’hui les centres de la production pétrolière aux États-Unis, mais c’est en Pennsylvanie que le capitalisme pétrolier américain est né. La nature transformative de la découverte du pétrole à Titusville en 1859 ne peut être exagérée. Son impact a été planétaire. »

Mon travail se situe à l’intersection de la non-fiction créative, du journalisme et des études sur l’Anthropocène. Les récits longs que j’ai écrits en tant que journaliste ont principalement été publiés dans des médias francophones, mais je publie également occasionnellement en anglais. La crise écologique et son héritage colonial sont depuis longtemps mes principales préoccupations. J’ai couvert des sujets allant de la désertification de l’Anatolie centrale aux baleines se réinstallant à New York, des conflits autour de la mémoire coloniale en Belgique au dilemme énergétique post-Fukushima au Japon. Entre 2015 et 2022, j’étais basé à Abu Dhabi, aux Émirats Arabes Unis. Cet emplacement m’a offert un point de vue privilégié pour aborder le pouvoir transformateur du pétrole sur les sociétés, les économies et les cultures. En 2021, j’ai intégré le master en Écopoétique et Création Littéraire à l’Université d’Aix-Marseille pour explorer plus avant les connexions complexes entre le pétrole et la fiction.

J’ai travaillé sur une narration personnelle concernant le pétrole et le changement climatique dans la péninsule Arabique ainsi que sur une pièce courte sur l’addiction de l’humanité aux combustibles fossiles, « Petromelancholia, » qui a été présentée lors de l’édition 2023 du festival littéraire Le Murmure du Monde dans le Val d’Azun, en France. Mon projet actuel de non-fiction créative s’appuie sur ce travail. Il revisite la mythologie moderne autour du pétrole depuis le berceau historique de son exploitation industrielle, la ville de Titusville en Pennsylvanie. Le généreux soutien de Villa Albertine me permet de semer les graines de ce nouveau projet.

 

Née en 1978, Amélie Mouton est une écrivaine et journaliste belge. Elle est diplômée en Études Cinématographiques de l’Université de Liège et titulaire d’un master en Écopoétique et Création Littéraire de l’Université d’Aix-Marseille. Ses essais de non-fiction créative et sa poésie ont été publiés dans le volume édité Des vivants et des luttes (Wildproject, 2022), AOC Fictions (2022) et Pourtant (2023). En 2022, elle a reçu une bourse de résidence pour l’écriture de la Fondation Jan Michalski en Suisse, et en 2024, elle a été lauréate de la bourse « Brouillon d’un rêve littéraire » de la SCAM. Elle vit à Montréal.

Le pétrole a transformé le monde moderne. Sa circulation omniprésente a créé de nouvelles configurations de pouvoir et son exploitation industrielle a encouragé des aventures coloniales malavisées. Accros à cet or noir, nos sociétés en sont venues à croire qu’elles pouvaient poursuivre une quête de croissance perpétuelle et d’hypermobilité. Pourtant, l’omniprésence du pétrole est le plus souvent abordée en termes technologiques, industriels ou économiques. Le fait que les hydrocarbures aient également profondément façonné la culture moderne est beaucoup moins souvent considéré.

Mon projet cherche à combler cette lacune et à contribuer à la prise de conscience croissante de l’ampleur avec laquelle la pétroculture a remodelé la modernité. Travaillant à l’intersection de l’écriture de voyage et du journalisme littéraire, je revisite un moment fondateur de l’histoire du pétrole : le premier forage réussi dans les années 1850, un événement qui a littéralement ouvert les vannes à l’exploitation de masse d’une ressource naturelle qui allait transformer les modes de vie à travers le monde.

Cette scène inaugurale de notre présent de dépendance au carbone et de désordre climatique s’est déroulée à Titusville, en Pennsylvanie rurale. Prendre au sérieux l’idée d’Amitav Ghosh selon laquelle la crise climatique est aussi et avant tout une crise de l’imagination, je vise à explorer les possibilités narratives qui émergent de ce lieu. Les outils de l’écriture de lieu m’aideront à interroger notre relation à l’énergie et sa centralité dans les histoires que nous racontons sur nous-mêmes.

Les États-Unis se tiennent évidemment comme un géant dans le secteur énergétique mondial. Un rapport publié par CNN à la fin de 2023 indiquait que les États-Unis étaient sur le point de produire plus de pétrole que tout autre pays n’en avait jamais produit auparavant. Cette position dominante dans la production de pétrole, juxtaposée aux effets de plus en plus visibles du changement climatique, fait des États-Unis un lieu crucial pour examiner les complexités de la transition énergétique.

Le Texas et l’Alaska sont peut-être aujourd’hui les centres de la production pétrolière des États-Unis, mais c’est en Pennsylvanie que le capitalisme pétrolier américain est né. La nature transformative de la découverte du pétrole à Titusville en 1859 ne peut être exagérée. Son impact a été planétaire. Mon objectif est d’écouter les résonances de nos débats actuels sur un monde après le pétrole, dans le lieu où son exploitation moderne a commencé.

Une des questions pour ma résidence est d’interroger la curation historique du pétrole : quels récits sont mis en avant ? et quels récits sont silenciés ? Bien avant le XIXe siècle, les Seneca, la plus grande des six nations amérindiennes qui composent la Confédération iroquoise, utilisaient déjà les richesses pétrolières de la Pennsylvanie à diverses fins, y compris médicinales. Cette histoire est peu connue, pourtant c’est la connaissance des Seneca sur la localisation des dépôts d’« eau noire » qui a permis son exploitation ultérieure par les colons.

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