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Ngnima Sarr

Poétesse, chanteuse, rappeuse, artiste visuelle et productrice

  • Arts visuels
  • Musique
  • Poésie
  • Atlanta

« Je crois que le premier endroit pour initier des mutations profondes, c’est notre imaginaire. »

Je suis une artiste sénégalaise et je vis en France, où j’ai obtenu une maîtrise en sociologie. Artiste polymorphe, mes leitmotivs sont l’expérimentation et l’hybridation des formes : de la peinture, je suis passée à la musique, aux installations, au spectacle vivant et je me passionne pour l’autofiction en vidéo. Je suis convaincue que nous nous construisons autour des histoires que nous nous racontons, et qu’il faut les réécrire si l’on veut changer le monde. Au cœur de mon travail, quel qu’en soit le support, il y a la volonté d’ouvrir des espaces pour débattre, questionner et transformer, pour soi et pour les autres.

En tant que femme, je crois que le monde a besoin d’une plus grande sensibilité féminine pour guérir et se transformer radicalement. Ces cinq dernières années, j’ai donc mené plusieurs projets autour de la thématique de l’énergie féminine, comme l’installation et la performance Mawu’s Daughters, qui aborde notre relation à la Nature divine et à la technologie féminines, ou la création collaborative et multidisciplinaire Le Vaisseau mère, fruit de quatre mois d’ateliers avec mon collectif Les Femmes Sauvages, qui réunissait une soixantaine de participantes d’horizons et d’âges différents pour s’interroger sur le rôle de la notion de genre dans les rapports de force dans la société. Dans le cadre de mes recherches en cours sur l’utérus en tant que vaisseau, j’ai animé d’autres ateliers, dont un, pendant deux mois, avec des femmes incarcérées pour utiliser l’utérus comme espace symbolique et rassurant, afin d’engager une guérison à la fois personnelle et collective.

Ngnima Sarr, alias T.I.E, est une artiste sénégalaise aux multiples facettes : chanteuse, poétesse, compositrice et productrice de musique, elle mène des projets comme T.I.E and The Love Process et Exillians. Elle a également créé le spectacle immersif Lâcher l’homme !, inspiré de l’essai Black Skin, White Masks de Frantz Fanon.

Elle a aussi participé récemment à la pièce Freedom, I’ll Have Lived Your Dream Until the Full Last Day (« Liberté, j’aurai vécu ton rêve jusqu’au dernier jour »), organisée par Felwine Sarr et présentée à New York et en Caroline du Nord avec le soutien du Face Theatre de la Villa Albertine et du programme Fused.

Son travail s’enracine dans une vision afro-écoféministe, évidente dans son installation Mawu’s Daughters, créée à Dakar pour le Partcours 2022. Son Odyssée in utero actuelle est un objet de recherche polysémique initié dans le cadre de sa résidence Banlieues bleues à Paris en 2021 et 2022.

Je crois que le premier endroit pour initier des mutations profondes, c’est notre imaginaire. Odyssée in utero est un voyage à travers l’espace, le temps, la mémoire et le territoire, avec l’utérus pour vaisseau. Il s’agit d’explorer des questions existentielles à travers la perspective du corps féminin. J’ai toute confiance dans la force évocatrice des mots, et je souhaite utiliser le pouvoir créateur et régénérateur de l’utérus comme un moyen d’action. Pour ce faire, j’utilise la pratique du cercle comme un espace transmué en espace de sécurité utérin où le corps, les mots, la musique et les images sont autant de chemins vers une cartographie de soi et du monde à transformer.

J’ai expérimenté ce dispositif dans la version pilote du projet à la maison d’arrêt femmes de Fresnes, pendant deux mois, avec un groupe de détenues. L’expérience a révélé un principe de guérison, voire d’autorévolution intrinsèque à ce que j’appelle la performance rituelle. Le geste scéno-poétique du rituel permet de métaboliser ce qui est évoqué par les mots, d’inscrire notre présence dans le monde, et déclenche de nouveaux modes de perception de soi et d’appréhension du monde qui nous entoure.

Dans le cadre de ma résidence à la Villa Albertine, j’espère approfondir mes connaissances sur ce dispositif en coanimant un laboratoire de création avec des femmes et des artistes afro-américaines disposées à explorer la mémoire transgénérationnelle du corps, en dialogue avec des danseurs ou des chorégraphes reproduisant des gestes passés, présents et futurs porteurs de cette mémoire, à travers la performance. Pour une future installation, j’aimerais rencontrer des acteurs et artistes locaux, imaginer quel serait le meilleur outil interactif dans le domaine de l’art numérique pour explorer les contrées mystérieuses que portent et sont les ventres des femmes noires. Enfin, j’aimerais documenter toutes ces expériences par le biais d’enregistrements audiovisuels, afin de constituer une archive qui servira de base à un projet de film documentaire expérimental.

Je crois en une nécessaire guérison transgénérationnelle de la diaspora africaine contre les expériences traumatisantes de l’esclavage et du colonialisme, et le traitement violent de nos corps dans le monde. Je crois que ce sont les femmes noires, en qualité de mères, qui en subissent le plus les effets et qui jouent un rôle central dans le processus de guérison collective. J’ai choisi de mener ce travail à Atlanta, qui a joué un grand rôle dans l’histoire de l’émancipation afro-américaine et qui est aujourd’hui à l’avant-garde des débats sur les Noirs dans le monde de l’art. Les femmes noires américaines subissent depuis longtemps des discriminations ethniques et sexuelles liées à la manière dont la société est structurée. En tant qu’Africaine dans un monde occidental, je peux m’identifier à ce double préjudice. Dans cette société, nous sommes les personnes les plus vulnérables, mais aussi les plus résilientes et les plus innovantes.

Pour ce travail, j’utiliserai le triangle comme forme géométrique de référence. En son centre, je souhaite placer l’Afro-Américaine, pour dialoguer avec le corps, la mémoire et le territoire. Le triangle fait référence à la féminité, à un passage et à un pôle magnétique synonyme d’attraction et de mutation, qui fait lui-même écho aux voies du commerce transatlantique pour une nouvelle métamorphose symbolique de la circulation des corps noirs.

Je souhaite que cette recherche soit un échange, une expérience partagée avec des acteurs comme ADAMA, Rainna Brown, fondatrice et directrice artistique du Komanse Dance Theatre, qui renforcent le sentiment d’appartenance de la diaspora à travers les œuvres d’art. J’adorerais interviewer Beverly Guy-Sheftel, pionnière du féminisme noir et fondatrice du Centre de recherche et de ressources sur les femmes. En utilisant la musique pour atteindre les espaces liminaires, j’aimerais également rencontrer l’artiste Okori Johnson.

En partenariat avec

Banlieues Bleues

Banlieues Bleues (which means “blue suburbs”), non profit association originally funded by 12 towns of Seine-Saint-Denis (on the outskirts of Paris) runs since 1984 the festival of the same name, a key event in the French musical season, offering an artistic platform of international repute where creativity and revelations occupy a large place of the bill. Through a wide range of workshops called “actions musicales” it has also assumed the pioneering job of heightening awareness and sensitivity, together with musical training, for the general public and particularly for new audiences. Throughout the year, Banlieues Bleues runs also its own venue, La Dynamo, a musical complex located in Pantin welcoming cutting-edge concerts and also residencies and rehearsals.

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