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Alice Chemama

Autrice
Juin - Juillet 2023

© Tony Trichanh

  • Bande dessinée
  • San Francisco

« une fois installée en “Bear Country“, confrontée à l’expérience de vie en territoire partagé avec les ours noirs et les grizzlys, c’est l’actualité de cette cohabitation qui a capté mon attention. »

Je suis une artiste-autrice dont le parcours est régulièrement guidé par des expérimentations en extérieur. À l’origine de cette approche : une pratique compulsive du dessin et une passion des grands espaces.

Durant plus de dix ans, je fréquente le milieu équestre, et c’est au contact des chevaux que je commence à interroger l’évidence de la domination sur l’animal. Adolescente, la découverte des parcs nationaux américains et de l’histoire de cultures Natives m’amène alors à questionner notre suprématie sur l’ensemble du vivant.

Ces problématiques imprègnent mes projets à l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris, dont je sors diplômée en 2017 avec le court-métrage Holy Chic, night-club mêlant corps en transe, dancefloor et feux de forêt. Dans la lignée de mon mémoire, ce film d’animation marque le début d’une recherche sur la puissance des histoires et leur capacité à mobiliser les consciences.

L’appel du dehors s’arroge une place dans ma démarche artistique lorsque, suite à une expérience calamiteuse en refuge de bébés kangourous orphelins, je produis mon premier reportage dessiné et adopte l’immersion comme base de création.

En 2020, je suis résidente des Ateliers Médicis implantée en Haute-Savoie, où j’interviens auprès d’une classe de CM2. Ensemble, nous explorons le rôle de la mémoire collective dans l’appréhension du territoire. Ce projet inspire « Dans l’Ombre du Mont-Blanc », album à la narration hybride témoignant d’une volonté d’observer une culture dans sa complexité, de croiser les points de vue, et d’en comprendre les origines pour aider à repenser les récits et la société de demain.

 

Alice Chemama est une artiste-autrice franco-américaine diplômée de l’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris, s’exprimant principalement par l’image fixe ou animée, et dont le travail est marqué par des préoccupations sociales et écologiques. Son court-métrage Holy Chic est primé en festival, tandis que son reportage dessiné Les Kangourous de l’Apocalypse, lauréat du concours Libé Apaj, lui ouvre les portes des éditions Dargaud. Elle illustre Les Zola, nominé aux Eisner Awards et primé à Bassillac, puis publie Dans l’ombre du Mont blanc, né d’une résidence des Ateliers Médicis. Elle a collabore parallèlement avec La Revue Dessinée, la revue TOPO, Elles Women Composers, Actes Sud Jeunesse, … 

Sur les vastes massifs américains plane aujourd’hui encore le spectre d’un super-prédateur des plus éminents, capable de se mettre debout, de vous suivre en haut d’un arbre ou à travers un torrent. C’est là-bas qu’il y a quelques années, j’ai ressenti pour la première fois l’inquiétude primitive d’être dévorée. Une peur justifiée, nourrie par les mises en gardes proférées avec le plus grand sérieux, les histoires de coin du feu ainsi que tout un imaginaire ancestral de la bête sauvage. Omniprésent, l’ours resta pourtant absent, plus discret et plus prudent que sa légende.

Poursuivant mon exploration des liens entre fiction et perception du réel, j’ai souhaité interroger mes propres frayeurs et m’intéresser au cas de cet animal emblématique, fascinant et dangereux, tantôt totem, tantôt trophée, monstre ou peluche. Le but étant d’observer comment des récits plus ou moins fantasmés avaient pu conditionner notre rapport au prédateur, et de se réapproprier leurs leviers pour imaginer de nouvelles histoires plus en phase avec les réflexions actuelles sur notre place dans le vivant.

En résidence dans le Greater Yellowstone Ecosystem et son parc national, je suis donc partie en quête de contes, légendes et autres anecdotes historiques. Mais une fois installée en “Bear Country“, confrontée à l’expérience de vie en territoire partagé avec les ours noirs et les grizzlys, c’est l’actualité de cette cohabitation qui a capté mon attention. Habitants accoutumés ou terrifiés, soigneuse de grizzlys, randonneur téméraire, pisteur passionné ou chasseur retraité, les humains du Yellowstone ont accepté de me confier leur réalité, laissant les fantasmes au touristes et au monde extérieur. Derrière les grilles d’un refuge, sur une route ou un chemin de randonnée, les ours ont eux aussi pu témoigner.

Mes deux mois et demi de dessins, notes et photos ont inspiré de nouveaux récits et recherches graphiques, ouvrant une phase de création post-résidence en collaboration avec la revue TOPO et les éditions Dargaud.

La région du Greater Yellowstone Ecosystem est l’un des rares écosystèmes préservés de l’hémisphère nord. Il abrite notamment le célèbre Yellowstone National Park, dont les 8.991km2 sont répartis sur les états du Wyoming, de l’Idaho et du Montana.

Qualifiée de “Bear Country” (territoire des ours), cette région compte l’une des plus grandes populations d’ours noirs et de grizzlys du pays. C’est surtout le second qui focalise l’attention : plus gros que son cousin, il est aussi reconnu comme étant plus agressif et imprévisible. Proches de l’extinction dans les années 1970, les grizzlys sont depuis protégés par l’Endangered Species Act. Une mesure encore d’actualité dans les trois états en 2023, bien que source de débats.

Or sur ce territoire qui est aussi celui des humains, le nombre d’habitants est en constante augmentation tandis que la fréquentation touristique du parc national atteint des records (presque cinq millions en 2021). La densité et la proximité de nos espèces sur ce même espace, à la fois sauvage et aménagé, en fait un cas particulier où le risque d’interactions dangereuses est une problématique du quotidien. Cette cohabitation nécessite d’ailleurs quelques adaptations, telles des poubelles à l’épreuve des griffes et le port d’un spray au poivre longue portée, ou d’une arme à feu selon les goûts. Ici la signalétique invite à la vigilance et à l’humilité. La mise en garde commence aux abords des routes en lettres capitales : “Be bear aware” (Présence d’ours : restez attentifs). Dernier avertissement à l’entrée des chemins de randonnée : There is no guarantee of your safety in bear country (Il n’y a aucune garantie de votre sécurité sur le territoire des ours).

En partenariat avec

Dargaud

Éditeur généraliste et tout public de séries BD comme de romans graphiques, Dargaud s’attache autant à mettre en valeur le patrimoine de la bande dessinée, de Lucky Luke à Blake et Mortimer, qu’à défendre la création contemporaine, du Chat du rabbin à Blacksad, du Monde sans Fin aux Vieux Fourneaux, ou La Légèreté. Son catalogue affiche aujourd’hui 4 000 titres, vendus chaque année dans le monde entier à plus de 5 millions d’exemplaires.

 

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TOPO

TOPO est une revue d’actualité pour les moins de 20 ans (et les autres). Chroniques, grands reportages et vulgarisation scientifique : face à la propagation des théories du complot et des fake news, il est urgent de fournir des clés pour décrypter l’actualité. TOPO, c’est une revue qui fait le pari d’associer au plaisir de la bande dessinée le sérieux du journalisme pour permettre aux jeunes lectrices et lecteurs de développer leur sens critique et citoyen. TOPO fait le pari d’associer au plaisir de la bande dessinée le sérieux du journalisme.

 

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